lundi 3 août 2015

Bretagne nord, belle région, climat un tantinet ingrat


Etape 24 : Roscoff (France) - Pontivy  139 km ; dénivelé : 1 700 m


Kilométrage depuis le départ : 3 366 km

Météo : Pluie forte tout le trajet. Vent modéré direction variable.  Température : 20° maxi


L’étape du jour sous le signe de la pluie. Du petit crachin d’accueil à Roscoff, alors que j’avais eu si beau en Angleterre, à la pluie forte à partir de Morlaix, une compagne pour la journée…

Arrivée à Roscoff

baie de Morlaix


Morlaix


Mais tout avait commencé bien avant. A Plymouth, vers 22h la veille. En attente avec 6 autres cyclistes du chargement à bord du Ferry, dont un jeune Anglais qui allait sur Brest le lendemain, habillé plus explorateur que cycliste et un Danois vivant en Angleterre qui partait faire deux semaines en Bretagne. 

C’est long à charger ce type de bateau. 170 mètres de long, 120 hommes d’équipage, 1500 passagers et une capacité d’accueil de 470 voitures. Et donc 7 vélos. A minuit on était à bord, vélo attaché dans la cale.



Donc je monte les ponts pour gagner le niveau où se trouve mon siège.



Ok, type avion, dormir assis, va falloir trouver autre chose. Mais avant je fais un tour du navire pour voir à qui j’ai affaire. Je contrôle les issues de secours et les canots de sauvetages, je ne trouve pas ma place réservée dessus. Sans doute qu’en cas de naufrage, ils font un tirage au sort. Je ne me formalise pas, contrôle mon vis-à-vis et désarme les toboggans et je m’apprête à aller me coucher, vu qu’il est quand même 1 heure du matin, heure française. 

Mais avant je décide d’aller prendre un peu l’air (frisquet) à la poupe du navire. Pour ceux qui seraient peu au fait du vocabulaire maritime, la proue c’est l’avant et la poupe l’arrière. Pensez à Léonardo Di Caprio qui enlace Kate Winslet dans le film Titanic, ils sont à la proue. Moi j’étais sans Kate Winslet et à la poupe. Et là machinalement je regarde le sillage du navire. Et j’ai tout de suite été intrigué par un détail. 

Il manquait d’éclat et de longueur. Pas normal, je me dis, il n’est pas à fond le raffiot ! Ni une ni deux, je rentre à l’intérieur pour qu’il mette un peu les watts, si c’est plus cher niveau mazout, on se cotisera. J’alpague le premier marin qui passe, furax, vu que j’ai une étape à faire à vélo tout à l’heure et que je ne suis pas là pour faire une croisière d’agrément, moi. J’ai failli parler Américain parce que j’étais en colère, mais je suis resté sur l’Anglais :
« Sorry sir, I wan’t to talk to the Captain immediately ! »
Il me répond:
“Vous parlez français ?” dans un français impeccable.
J’avais oublié que j’étais sur un bateau français, vu que les British ont trusté plus des ¾ du trafic transmanche.

Donc autant vous dire que le Capitaine je ne l’ai jamais vu, pas plus que le reste de sa seigneurie maritime, ils sont tous sur la passerelle et te regardent de haut !
Vous allez me dire, ils n’ont pas que ça a faire, ils ont un bateau à piloter. Excusez-moi mais avec un gros moteur à l’arrière et des propulseurs d’étrave, ça se gare mieux qu’une Twingo.
Vous allez me dire encore qu’ils ont la responsabilité de milliers de vies. Excusez-moi encore mais regardez ce capitaine italien de la compagnie Costa qui a posé son paquebot sur une île en le prenant pour un hors-bord, et bien Costa croisières continue à faire des bénéfices. Donc ils ont droit aux pertes, comme à l’armée.

Enfin, dépité, je suis allé parler de tout ça avec le plus haut placé dans la hiérarchie du bord qui ait accepté de me parler, le barman. Je lui dis qu’on aurait pu gagner facile deux heures sur la traversée, et que c’est comme les trains couchette, on se traîne pour que le touriste passe une nuit complète à bord, et rentabiliser les cabines. Et vous savez tout ce qu’il a trouvé à me dire ?
« Vous voulez quelque chose à boire ? »

J’ai quitté le bar à bout d'arguments, et j’ai recherché un salon pour dormir. J’ai squatté 3 sièges, juste ma longueur, parfait. Enfin presque parce les sièges sont un peu relevés sur les côtés et séparés de 20 cm, donc j’ai dormi un peu dispersé, voir éparpillé. Et un peu cassé du dos aussi, je me réveillais toutes les heures, j’ai dû dormir 3 heures maxi. Ceci étant, il y avait une bonne houle et le bateau roulait sensiblement, comme une berceuse pour dormir.

On arrive à Roscoff, magnifique petit crachin. J’ai pensé que ce n’était pas une très bonne publicité pour ma Bretagne natale, surtout après 4 jours sans une goutte en Grande Bretagne.
Mais le crachin s’est vite lassé, vers Morlaix au bout de 20 bornes, pour faire place à…une pluie battante toute la journée jusqu’à Pontivy où je me suis arrêté et la pluie…aussi. Le soleil a tenté une seule percée dans la journée, vite renvoyé à ses études par le rideau de nuages. C’est embêtant comme image de retour en France, on comprend que certains s’exilent, et pas que pour des raisons fiscales. 

De plus ce n’est pas le climat habituel de la Bretagne. On vante souvent Embrun, au bout du lac de Serre-Ponçon, comme la ville la plus ensoleillée de France, quelque chose comme 300 jours par an. Mais ici, on fait bien mieux. 500 à 600 jours de soleil par an ne sont pas rares. Et pourquoi ? Parce que le soleil vient plusieurs fois par jour ! La pluie aussi, mais voyez plutôt le verre à moitié plein.

A partir de Morlaix, j’ai quitté le pays de l’Armor (la Bretagne de la mer) pour l’Argoat (la Bretagne des terres). Je presse le pas en direction de Callac. J’avais juste mangé un scone acheté la veille à Plymouth, je commençais à avoir faim, je comptais m’arrêter chez la pâtissière. Mais je ne sais pas qui a fait le parcours, ah si c’est moi, je ne suis passé que par des petits patelins perdus où tout était fermé. J’ai fait l’étape avec un scone dans le ventre et une barre énergétique, tout le reste des provisions énergétiques étant dans le sac sous double bache de protection, je n'allais pas m'amuser à tout ressortir. Autant dire que j’avais les crocs à l’arrivée !

Et c’est bien dommage parce que je comptais acheter un gâteau breton sur le chemin. Le Knouign aman à Lolo, c’est un peu la madeleine de Proust. Et c’est meilleur. Il faut que je vous parle du knouign aman.
Vous connaissez tous le quatre quart. Le knouign aman, c’est plutôt le deux moitiés. 50% beurre, 50% sucre en gros, on rajoute juste un peu de pâte à pain pour que ça se tienne lors de la cuisson. Un bon knouign aman, le beurre doit te murmurer à l’oreille et te pétiller à l’œil lorsque tu appuies dessus. Du sucre, de la graisse, idéal pour fournir l’énergie immédiate et différé pour le cycliste de passage. Mais attention, le vrai knouign aman, c’est à Douarnenez qu’on le fait, et ce n’était pas sur ma route. Je le sais parce qu’une fois en juillet 2010, le 22 je crois, vers 16h10 approximativement, j’étais en train de boucler une étape de mon tour de la France entre Saint-Brieuc et Douarnenez et je passe par le joli village de Locronan, à 5 kilomètres dans les terres au-dessus de Douarnenez. Et là j’ai acheté ce gâteau. Il faut dire que j’en avais un très bon souvenir, quand j’étais venu la première fois avec des copains en 1987, mais je n’arrive plus à me rappeler ni le jour, ni l’heure. Bref, quand j’ai raconté ça à mon père ! Il me l’a dit :
« Le vrai knouign aman, c’est Douarnenez ! »
J’ai répondu que ce n’était pas possible qu’en 5 kilomètres ils aient perdu la recette, mais il n’en a pas démordu, il a des principes. Ceci dit, il était délicieux et m’a bien aidé à finir l’étape, 5 kilomètres, en descente…
Mais pourquoi je dis ça, je ne sais plus au fond, c’est comme Proust, je fais des phrases trop longues.

Bref je continue ma route sous la pluie et j’arrive à Callac. Vu ce qu’il tombait, je n’avais même pas remarqué, du coup j’interroge un des rares habitants dehors pourquoi je ne vois plus de panneaux indicateur de Callac. Mais parce que vous y êtes ! Je suis reparti discrètement…

Sur le chemin, je croise des chevaux bretons. Faut que je vous parle du cheval : il m’inspire moins que la vache, le porc ou le mouton, parce qu’il ne se mange pas. A la rigueur on en retrouve parfois par inadvertance dans des plats de lasagnes avariés, mais bon. Le cheval breton, c’est du lourd. Si vous cherchez un motoculteur pour votre potager, prenez plutôt un cheval breton, il vous labourera votre parcelle en deux coups de cuillère à pot.


cousins bretons de Little big horse


Comme il pleuvait et que je n’avais rien à faire à part rouler et cogiter, je repensais à ma tournée en Angleterre. Je vous ai déjà parlé du GPS Augustin et du GPS Garmin. Mais il faut que je vous parle du GPS Anglais.
C’était à Weymouth avant-hier. Je devais poursuivre mon chemin après cette charmante station balnéaire et je m’arrête devant un habitant du coin pour rechercher un village. Il commence à m’expliquer comment y aller. J’ai cru qu’il allait me décrire le parcours pour y aller mètre par mètre ! Tout en anglais évidemment, j’ai décroché assez vite. Mais il continuait son explication. Au bout de 5 minutes je m’étais endormi sur le guidon de mon vélo, il me réveille et me dit :
« Understood ? »
Poli, je fais : « Yes ! Straight through ! »
Et effectivement, c’était tout droit.
Le GPS anglais se perd trop dans les détails…

A la fin de mon parcours, je devais passer par la côte de Mur de Bretagne et le lac artificiel de Guerlédan, qui est vidé de son eau pour six mois, ce qui n’est pas arrivé depuis 1975. Même si le poncho avait encore fait du bon travail sur cette étape, je n’avais pied qu’à partir du nombril depuis un moment déjà. J’ai donc décidé de couper direct entre les deux pour filer sur Pontivy (8 km en moins). Je me suis dit la chose suivante : la côte de Mur de Bretagne passerait parfaitement incognito si elle se situait dans le Devon en Angleterre, là-bas des murs, y’a que ça !

Et pour le lac, j’ai estimé qu’avec la quantité de flotte qu’il était tombé aujourd’hui, il y avait peu de chance qu’il soit encore vide…

Demain, la Bretagne sud, beau temps annoncé, cela fera du bien.

Sur ce, kenavo !

Quelques images:

Arrivée à Pontivy (rivière: Le Blavet)

vélo spécialisé transport d'oignons

vaches bien garées, en épi. A noter que celle du fond a du mal à finir son créneau.

St Pol de Léon

St Pol de Léon


Et demain ? Nantes ! J'y suis né, c'était il y a 52 ans. Hébergement prévu en hôtel 5 étoiles: chez mes parents.

Rappel du parcours : tous les parcours dans l’article « Mes parcours » du mois de juin

Remerciements :
A Aline Gadin, du Pontivy journal.

Demande :
J’aimerais bien retravailler mes chroniques saisies au jour le jour de mon itinérance dans le but d'une publication, alors si jamais vous avez un ami qui aurait un ami qui serait ami avec un éditeur, ça m'intéresse.

2 commentaires:

  1. Quiz: Comment avoir le sens du vent en regardant des chevaux ?
    Si tu ne vas pas trop vite tu ne devrais rattraper la pluie ...

    Réponse: Ils ont les fesses au vent !

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  2. En fait j'espérais la semer la pluie, mais je n'allais pas assez vite...

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